GASTRONOMIE DES DIEUX VAUDOU
Contrairement à la croyance petite-bourgeoise, les Esprits (loas du vaudou) mangent et savent consommer. Les loas d’Haïti ou de l’Afrique mangent dans la joie28, 38, contrairement aux saints de l’Église Catholique qui fonctionnent, paraît-il, en silence. Les menus des loas varient en fonction de leurs rangs et attributs.
AGOUÉ (jour: dimanche et tous les jours)
Nourriture: Barque d’aliments. Viande de mouton et d’agneau. Fruits: ananas, orange, poire, prune, datte, mangue, nectarine. Autres : Cigare, thé à la menthe, pâtisserie orientale.
Boisson: Champagne.
Couleur: Bleu vert.
Parfum: Florida, Pompéi.
Ustensiles: Foulard de couleur bleu vert, bougie de couleur similaire.
Pierre précieuse: Or, Rubis.
BARON (jour: samedi ou tous les jours)
Nourriture: Hareng salé, patate douce (à peau violette ou blanche), épis de maïs, maïs moulu, hareng saur, cabri ou chèvre, tasso, plantain boucané, igname, soupe giraumon, bouillon à l’haïtienne et dombreuil.
Boisson: Rhum blanc Bacardi, clairin et piment fort (sept ou vingt et un), Tequila.
Couleur: Noir ou mauve.
Ustensiles: Foulard noir ou mauve, tabac et pipe, cigare, café sans sucre, cigarette.
Pierre précieuse: Onyx noir, Or ou argent, Améthyste.
DAMBALLAH (jour: jeudi)
Nourriture: riz blanc, lait, œuf, pigeon blanc, farine, sirop de miel, gâteau, douce (sucre à la crème) à l’haïtienne.
Morue blanche pimentée sur riz à pois de souche.Boisson: Vodka, whisky écossais, Bailey’s, sirop d’orgeat.
Couleur: Blanc
Parfum: Florida, Pompéi.
Pierre précieuse: Or, Émeraude (vert).
ERZULIE DANTOR (jour: mardi et samedi)
Nourriture: Riz collé au pois de couleur noire, banane pesée, griot à base de viande de porc, café noir sucré, cigarette (pas de préférence). Fruits: raisin rouge, orange, clémentine.
Boisson: Cinzano, Tia Maria, Grand-Marnier, vin rouge sucré, sirop de grenadine de couleur rouge.
Couleur: Bleu royal ou rouge.
Parfum: Florida, Rêve d’or.
Ustensiles: Foulard de couleur bleu royal, bougie bleue ou rouge, poignard, bouquet de fleurs à rose rouge.
Pierre précieuse: Argent.
FRÉDA (jour: jeudi)
Nourriture: Poisson, poulet, pigeon blanc, plantain mûr, ananas.
Boisson: Sirop d’orgeat, Amaretto, Anisette.
Couleur: Rose, bleu ciel, et blanc (identifiée des fois à Immaculée Conception).
Parfum: Florida, Bien-être (Cap-Haitien), Rêve d’or (Port-au-Prince).
Pierre précieuse: Or, diamant.
GUÉDÉ (jour: samedi)
Nourriture: Mélange à base de pois, de maïs en grain et de viande épicée et salée (Tiaka), hareng boucané, patate douce et plantain boucané, tabac et pipe.
Boisson: clairin, piment fort, cannelle et canne-à-sucre.
Couleur: Noir, blanc, mauve et violet.
JEAN DANTOR (jour: mardi et samedi)
Nourriture: Mille feuilles, gâteau, tartre aux fruits, pâtisserie, assiette de bonbons et friandises, Cola rouge, sirop de grenadine.
Couleur: jaune pâle.
Pierre précieuse: Argent.
LEGBA (jour: mardi)
Nourriture: riz collé au pois noir, poule noire.
Boisson: Clairin et Sirop.
Couleur: noir, blanc.
Pierre précieuse: Pierre noire.
MARASSA (jour: vendredi)
Nourriture : Semoule de couscous (carotte, navet, courge, tomate, chou, pois chiche, raisin sec, mouton, beurre salé, beurre rance aromatisé de thym), cuit au beurre.
OGOU (jour: mercredi et vendredi)
Nourriture: Poisson rose ou rouge (frits ou en sauce tomate), riz collé au pois rouge, plantain et salade (laitue et tomate). Mélange de noix d’acajou, d’amande, de datte et de pistache. Lambi, crevette et fruits de mer.
Boisson: surtout le Rhum Barbancourt (cinq étoiles).
Couleur: Rouge
Parfum: Florida, Opium.
Ustensiles: Foulard rouge, bougie rouge, machette, tabac et pipe, cigare, café noir sucré.
Pierre précieuse: Grenat (rouge).
SIMBI (jour: samedi)
Nourriture: riz collé et viande de poulet.
Boisson: liqueur Saint-Raphaël, alcool fort (rite Pétro).
Couleur: Bleu ciel, blanc (Simbi Dlo, rite Rada); rouge (Simbi Makaya, rite Pétro).
Pierre précieuse: Or, diamant.
ZAKA MÉDÉ (jour: samedi)
Ustensiles: Absinthe, sac, pipe et tabac. Bouteille composée de clairin, anis étoilé, racine de «zodevan». Dans le sac ou «djakout» destiné à Zaka, on doit retrouver: bonbon amidon, pistache, bonbon sirop haïtien, noix de coco (coconut), pain blanc haïtien, une poignée de maïs, de riz et de pois, cassave, pain doux (bobori), surettes, bois de pin, allumette, et quelques sous noirs ou blancs.
Couleur: Bleu indigo.
Pierre précieuse: Rubis, Saphir.
Pourquoi s’entêtait-on, à une époque donnée44, 47, dans une attitude de refus, à vouloir détruire, sacrifier, et même faire disparaître une telle religion aux richesses inexpliquées? Incapable de comprendre les phénomènes et manifestations reliés au Vaudou, l’Étranger contrarié dans ses désirs de conquérant a toujours voté pour sa disparition en prenant soin de l’avilir de prime abord. Pourquoi faut-il toujours associer le Vaudou aux pactes de sang48 ou au monde de la sorcellerie49? Le Vaudou doit-il évoluer50 ou l’est-il? Autant de questions à débattre durant ce nouveau millénaire.
LA FORCE DE DISCERNEMENT DES COULEURS
Les loas sont classés en deux groupes principaux: les loas «doux» ou blancs (rite Rada) et les loas «chauds» ou rouges (rite Pétro) qui représentent la force de frappe du vaudou vindicatif et meurtrier. Erzulie Dantor, identifiée à la Déméter-Cérès africaine38 - 41, figure sublime et Reine de la Terre; et Damballah Ouèdo, dieu de la force et de la Connaissance, le Maître du Ciel, sont, sans aucun doute, deux des plus importants loas présidant respectivement à tous phénomènes terrestres et célestes. Selon Milo Marcelin10, Damballah est connu sous plusieurs noms: Damballah «Arc-en-ciel» Ouèdo (loa Rada, Moïse), Damballah LaFlambeau (loa Pétro, Saint Patrick), Pierre Damballah, Damballah Siligwé, Damballah Kato, etc. Il en est de même pour Erzulie qui coiffe plusieurs images de saintes catholiques sous forme de doublets. Le Pape Jean-Paul II, de regrettée mémoire, affichait une extrême dévotion pour la Vierge Noire de Pologne (Notre Dame de Czestochowa), laquelle, paraît-il, l‘accompagnait.
Les écrits ésotériques des anciens auteurs et philosophes haïtiens du Vaudou5-15 rappellent que les loas «doux» dits blancs sont ceux qui observent, commentent et dépêchent. Parmi eux, il y a lieu de citer Damballah Ouèdo (Saint-Moïse), Agoué (Saint-Ulrick), Legba (Saint-Antoine l’Ermite), Erzulie Fréda (Sainte-Rose, Mater Dolorosa, Vierge Miracle ), Maître Kafou ou Maître Carrefour (Saint-Lazare), Loko Atissou (Saint- Joseph ou Saint-Gabriel), Clermesine (Sainte-Claire), Filomise (Sainte-Philomène); tandis qu’on peut, entre autres, compter parmi les loas «chauds» dits rouges la déesse Erzulie Dantor (Notre Dame du Perpétuel Secours, Notre Dame du Mont-Carmel), les Ogou Feraille ou Chango (Saint-Georges), Legba (Saint-Antoine de Padoue), Lenglensou (Jésus ensanglanté), Jean Petro (Saint-Sauveur), Bossou (Saint-Vincent), Jean Dantor (Saint-Jean l’Évangéliste), Badè et consorts. De ces loas précités, certains sont considérés comme des «esprits» de nettoyage ou protecteurs (Legba, Ogou), de traitement ou guérisseur (Damballah, Simbi, Ossangne), de règlements de compte ou négociateurs (Badè, Lenglensou, Marassa); d’autres comme des loas «points» ou initiateurs à différents degrés (Kafou, Aizan).
Comme pour les vèvès9, 11, 22, 42, chaque Esprit ou loa du vaudou a sa propre couleur et son jour d’office10, 25. La Maîtresse Dantor (Notre Dame), dépendant du «degré» et du rite emprunté (Rada ou Pétro), préfère le rouge, le noir ou le bleu royal. Aïda (Ayida) Ouèdo (Immaculée Conception), femme de Damballah, opte pour le bleu du ciel et le blanc; Maîtresse LaSirène (Notre Dame de l’Assomption), le blanc; Damballah, le vert et le blanc; Agoué, le bleu vert; Aizan, le blanc; Zaka Médé, le bleu indigo; Badè, le vert pois; Jean Dantor, le jaune pâle; Simbi, le bleu ciel; Legba, le blanc, le rose, le jaune abricot ou le noir; Baron Samedi, le noir; les Guédé, le violet, le mauve, le blanc et le noir; Loko Atissou, le jaune; la déesse Fréda, le rose pâle, le vert et le blanc; Saint-Jacques Majeur, le bleu marin; Ogou, le rouge; Lenglensou, le vert pois ou le jaune foncé; la Maîtresse Aloumandia ou Alouba (Sainte-Anne), le blanc et le bleu; Grann (Grand-mère) Brigitte (Sainte-Brigitte), épouse de Baron Samedi, le blanc; Ogou Saint-Jean, le blanc, vert ou rouge; Agaou, le rouge et le bleu; Marassa, toutes les couleurs.
Les jours consacrés à ces dieux sont mystiquement le lundi pour les Guédé; le mardi pour la Maîtresse Dantor, le dieu Legba (rite Pétro), et tous ceux qui les accompagnent; le mercredi pour les Ogou; le jeudi pour la Maîtresse Fréda, Aïda et Damballah Ouèdo, ainsi que leurs alliés; le vendredi pour tous les Guédé; le samedi pour toutes les nations et, précisément, pour le Maître des Maîtres, Baron Samedi. Autres possibilités, selon les régions, des jours consacrés: Lundi, Brave Guédé, l’un des plus jeunes des Esprits; mardi, Dantor et Legba (rite Pétro); mercredi, Ogou Feraille; jeudi, jour de justice, Damballah, Fréda, Saint-Jacques Majeur; vendredi, les Guédé; samedi, jour de magie, jour de réunion, de rencontre des vingt et une nations ainsi que des cent et un esprits concernés. Mais tout cela demeure à la discrétion du Hougan ou de la Mambo, et ce, de génération en génération. Il nous incombe néanmoins de noter que ces jours d’opération ou consacrés aux esprits varient, non seulement, dépendamment de l’opérateur, c’est-à-dire du Hougan ou de la Mambo, mais encore en fonction des régions, des départements, et de l’accoutumance des «Habitations» des loas domestiques qui ne se retrouvent nulle part d’autre. Cette même dichotomie existe et persiste quand on fait la relation entre les loas et les images catholiques correspondantes. Car certaines illustrations de loas haïtiens par des chromos de saints catholiques varient également en fonction des zones, des cantons, des us et coutumes locaux. À Port-au-Prince, par exemple, c’est le culte Pétro (Simbi Andeizo, Dantor) qui est à l’honneur. Dans le Nord et le Nord-Ouest d’Haïti, les Guédé ne sont pas tolérés, alors que les loas dénommés Pierre (Pierre Dambara, Pierre Balawe, etc.) y sont vénérés. Les loas Ouangol, Amine et la Reine Congo sont honorés avec ferveur dans le Sud d’Haïti, alors que Danwezo est plutôt connu dans le Nord et surtout dans le Nord-Ouest d’Haïti. De plus, les rituels vaudou utilisés différemment dans plusieurs régions comme à « Nan Souvenance » (rite Rada-Dahomey, département de l’Artibonite), à «Nan Campêche» (département du Nord), à «Nan Soucri» (rite Congo, département de l’Artibonite), à «Nan Badjo» (rite Rada-Dahomey, département de l’Atibonite), démontrent la pluralité des lieux, des hommes et de leurs secrets. Quant à Saint-Jacques Majeur, il est identifié simultanément au loa dénommé Saint-Jacques ou à Ogou Balendjo (La Plaine du Nord, Haiti), et à Ogou Feraille (Arcahaie, Haiti). Les loas Ogou Achade, Legba Nago, Ogou Badagri, Ogou Balendjo, les quatre sont en général identifiés à Saint-Jacques Majeur22. Dans le département de l’Artibonite, l’image de Saint-Jacques représente Ogou Balendjo; Saint-Pierre, Saint-Pierre; Saint-Georges, Ogou Feraille; Saint-Joseph, Ogou Badagri. De ce fait, il y a lieu de se demander si les Ogou des rituels Rada (Ogou Bacouleh, Ogou Balendjo), Pétro (Ogou Chango), Congo (Simbi Ganga, équivalent de Saint-Michel), Nago (Legba Nago), Makaya (Simbi Makaya, équivalent d’Ogou Feraille), sont vraiment différents entre eux, une fois manifestés dans d’autres contrées ou sous d’autres rites?43
Le symbolisme des images et couleurs dans le vaudou haïtien
Loin de dédaigner le symbolisme des choses primaires, il convient dorénavant d’en prescrire la pratique. Même quand il se borne à de simples définitions, le symbolisme ouvre à l’intelligence humaine maintes portes dans les couloirs du savoir. Nous nous garderons de consulter l’excellent dictionnaire des symboles publié par Jean Chevalier et d’autres formules de définition1, 2, et force est de noter la définition donnée. Dans l’Ancien Testament3, et précisément dans les cinq livres de Moïse (Le Pentateuque), il est intéressant de constater que différent(e)s recettes ou rituels nous ont été légué(e)s par l’exécutant du Dieu caché4 des Hébreux que fut Moïse. De plus, il est symptomatique de retrouver dans la littérature ésotérique des formulations particulières concernant le symbolisme de l’amour ou du mariage mystique entre un être humain et tel ange conducteur qui lui est bénéfique et, selon les critères exigés par celui-ci, l’appréhension d’une loyauté qui lui est redevable. Ce geste ou cette action symbolique relatée dans le culte du Vaudou (5-29) a toute son importance dans la mesure ou l’élu(e) n’est plus ce qu’il était auparavant, un simple homme vacant à ses occupations journalières. Ses contacts dorénavant privilégiés avec son dieu demeurent si conséquents. Et l’on se demande encore aujourd’hui, comme l’avait déjà souligné Bergson30, comment «des êtres doués de raison pouvaient et peuvent encore accepter des croyances et des pratiques qui sont contraires à la raison»?
Toutes les religions, nous dit Evans-Pritchard31, «sont des religions de révélation, le monde extérieur et la raison ont révélé aux hommes l’existence du divin et leur ont fait prendre conscience partout de leur propre nature et de leur destin.» Et sous la rubrique Religion, ne peut-on pas faire entrer les notions de magie, de totémisme, de tabou et même de sorcellerie? Par exemple, pour F. B. Jevons32, la religion «est un développement uniforme et évolutionnaire du totémisme». C’est cette noble raison33 d’ailleurs qui nous permet d’apprécier les principes et les différentes interprétations que suggèrent le symbolisme de l’occulte et ses dérivés.
LA VALEUR SYMBOLIQUE DES IMAGES
Dans le seul désir de plaire au Colon (de l’époque des Colonies), la matérialisation de l’Ange ou des loas qui se fait, depuis l’esclavage, par la représentation des images de saintes catholiques, est une supercherie du genre fondé34, 35. Le fait de donner à chaque «Esprit» l’image catholique qui lui convient le mieux, ne saurait être chimérique. Cette tradition étant restée immuable par-delà les âges, il est, néanmoins, obligatoire de les baptiser36, 37 sous un nom fictif avant leurs «entrées» dans la maison des loas ou chez un particulier (oratoire ou rogatoire des loas), et de croire en leurs possibilités et en leurs pouvoirs pour qu’ils se manifestent. Voici en résumé ce que représente chaque Saint catholique pour chaque loa correspondant.
Saint-Patrick (Damballah): Vieillard pointant du doigt et donnant l’ordre aux serpents (de la main droite), et sceptre à la main gauche.
Saint-Ulrick (Agouet Aroyo ou Agoué): Vieillard tenant un poisson de la main droite, un livre et un sceptre de la main gauche.
Mater Dolorosa (Fréda): Femme couverte d’or et de bijoux.
Sainte-Philomène (Filomise): Une femme en prison, fleur à la main.
Saint-Lazare (Maître GrandChemin): Vieillard sur une route, accompagné de trois chiens.
Saint-Jacques Le Majeur (Ogou): Homme à cheval blanc, en pleine bataille.
Saint-Joseph (Loko Atissou): Homme portant un enfant de la main gauche, et une fleur à la main droite.
Sainte-Claire (Clermesine): Femme habillée en nonne, éclairant le monde d’une lanterne.
Saint-Antoine de Padoue (Legba, rite Pétro): Homme portant un enfant de la main droite.
Saint-Nicolas (père des Marassa): Vieillard entouré d’enfants.
Saint-Isidore (Azaka Médé): Paysan laboureur agenouillé et en train de prier.
Saint-Pierre (Legba): Homme, une clef à la main droite, et un livre à la main gauche, perché d’un coq rouge.
Saint-André (Simbi Andeizo, rite Pétro): Homme portant une croix – qui a aidé Jésus à porter sa croix.
Saint-Paul (Saint-Expedit): Jeune soldat présentant une croix (HODIE) de la main droite, et une feuille de rameau à la main gauche.
Sainte-Rose de Lima (Fréda): Femme baisant le pied de l’enfant Jésus.
Jésus-Christ (Lenglensou): Jésus (Olofi) crucifié, ensanglanté et couronné d’épines.
Notre Dame du Perpétuel Secours (Erzulie Dantor): Femme noire à balafre portant un enfant de la main gauche, tandis que l’autre main est placée sur sa poitrine.
Saint-Georges (Ogou Feraille ou Ogou Chango): Homme à cheval blanc et carpe rouge tuant le Dragon.
Saint-Jean Baptiste (Ogou Saint-Jean): Enfant accompagné d’un mouton, sceptre en bois de la main droite.
Santa Barbara (Erzulie aux yeux rouges): Jeune femme couronnée et carpe rouge, fixant une croix.
Saint-Martin de Porrès (Baron Samedi): Jeune homme tenant un balai de la main droite, et un crucifix à la main gauche.
Saint-Gérard Magella (Guédé Nibo): Homme habillé de noir, une croix à la main droite.
Saint-Côme et Saint-Damien (Marassa): Les deux jumeaux.
Fe, Esperanza et Caridad (Marassa): Les trois jumeaux.
Le choix d’une icône ou d’un chromo catholique adopté pour représenter un loa ou un Esprit vaudou ne jouit pas nécessairement d’une telle dévotion en raison des vertus chrétiennes du Saint ou de la Sainte. Cette option est plutôt due à des détails picturaux qui portent le «serviteur» à déceler des attributs propres à la divinité en question.
Le Vodou Haitien: Origine et croyances
Le mot "Vodou" vient du language parlé par les communautésFon du Dahomey. Né dans la clandestinité et, dans sa prime enfance, religion des esclaves noirs importés d'Afrique, le vodou intégra des éléments des religions africaines avec le culte des saints dans la religion catholique.
Le vodou joua un role primordial dans le combat quotidien que menait l'esclave transplanté d'Afrique pour conserver non seulement sa santé mentale dans un système, à tous les égards, deshumanisant, mais aussi et surtout pour rester connecter avec sa terre ancestrale. Sa pratique considérée subversive par le colon, devrait donc se faire dans la clandestinité. Plus tard, il devint le catalyseur dans l'organisation des révoltes contre les Français. Les historiens reconnaissent que la cérémonie du Bois-Caïman dans la nuit du 21 au 22 Août 1791 marqua le début de l'insurrection des esclaves de Saint-Domingue.
De cette époque jusqu'au mois d'avril 2003 quand un arrêté du gouvernement de Jean-Bertrand Aristide le déclara "religion à part entière", le vodou ne jouissait d'aucune reconnaissance légale. Plusieurs gouvernements ont essayé d'interdire sa pratique, y compris l'administration de Toussaint Louverture (Voir: 4 janvier 1800). Il fut l'objet de persécutions ouvertes et officielles pendant la fameuse campagne anti-superstitieuse sous le gouvernement d'Elie Lescot, ou sournoises après la chute du gouvernement de Jean-Claude Duvalier et, sur une base presque quotidienne, par des ministres des cultes reformés. En 2011, les vodouisant, dans certaines régions, furent accusés d'être les agents de propagation du choléra. Certains furent assassinés par des ignorants.
Pendant l'occupation américaine, la machine de propagande de l'occupant fit du vodou un « obstacle à la civilisation » et un champ où s'épanouit le démon (1); une thèse qui sera reprise par Pierre Pluchon presqu'à la fin du 20è siècle, en y ajoutant l'élément perversion (2).
N'empêche que les vodouisants n'avaient cure de ces dangers ou des critiques, et continuaient de pratiquer leur culte en privé ou publiquement dans leurs woufò, les lieux sacrés et lors des fêtes propres. Alors que d'autres, pratiquants ou non, le célébraient à travers des expressions culturelles comme les danses folkloriques, la musique dite "racine". Certains gouvernements l'utilisaient même à des fins purement politiques.
Pendant cette même période et tout au cours du 20è siècle, le vodou fut l'objet d'études ethnographiques très avancées, certaines décrivant un système théologique extrêmement complexe. Les arguments et les recherches des académiciens ne changérent pourtant pas la perception de ses détracteurs.
L'arrêté du 4 Avril ne vint donc qu'entériner cette pratique religieuse, jusque là clandestine, en la plaçant sous la protection des lois et institutions du pays au même titre que toutes les autres religions.