Le symbolisme des images et couleurs dans le vaudou haïtien
Loin de dédaigner le symbolisme des choses primaires, il convient dorénavant d’en prescrire la pratique. Même quand il se borne à de simples définitions, le symbolisme ouvre à l’intelligence humaine maintes portes dans les couloirs du savoir. Nous nous garderons de consulter l’excellent dictionnaire des symboles publié par Jean Chevalier et d’autres formules de définition1, 2, et force est de noter la définition donnée. Dans l’Ancien Testament3, et précisément dans les cinq livres de Moïse (Le Pentateuque), il est intéressant de constater que différent(e)s recettes ou rituels nous ont été légué(e)s par l’exécutant du Dieu caché4 des Hébreux que fut Moïse. De plus, il est symptomatique de retrouver dans la littérature ésotérique des formulations particulières concernant le symbolisme de l’amour ou du mariage mystique entre un être humain et tel ange conducteur qui lui est bénéfique et, selon les critères exigés par celui-ci, l’appréhension d’une loyauté qui lui est redevable. Ce geste ou cette action symbolique relatée dans le culte du Vaudou (5-29) a toute son importance dans la mesure ou l’élu(e) n’est plus ce qu’il était auparavant, un simple homme vacant à ses occupations journalières. Ses contacts dorénavant privilégiés avec son dieu demeurent si conséquents. Et l’on se demande encore aujourd’hui, comme l’avait déjà souligné Bergson30, comment «des êtres doués de raison pouvaient et peuvent encore accepter des croyances et des pratiques qui sont contraires à la raison»?
Toutes les religions, nous dit Evans-Pritchard31, «sont des religions de révélation, le monde extérieur et la raison ont révélé aux hommes l’existence du divin et leur ont fait prendre conscience partout de leur propre nature et de leur destin.» Et sous la rubrique Religion, ne peut-on pas faire entrer les notions de magie, de totémisme, de tabou et même de sorcellerie? Par exemple, pour F. B. Jevons32, la religion «est un développement uniforme et évolutionnaire du totémisme». C’est cette noble raison33 d’ailleurs qui nous permet d’apprécier les principes et les différentes interprétations que suggèrent le symbolisme de l’occulte et ses dérivés.
LA VALEUR SYMBOLIQUE DES IMAGES
Dans le seul désir de plaire au Colon (de l’époque des Colonies), la matérialisation de l’Ange ou des loas qui se fait, depuis l’esclavage, par la représentation des images de saintes catholiques, est une supercherie du genre fondé34, 35. Le fait de donner à chaque «Esprit» l’image catholique qui lui convient le mieux, ne saurait être chimérique. Cette tradition étant restée immuable par-delà les âges, il est, néanmoins, obligatoire de les baptiser36, 37 sous un nom fictif avant leurs «entrées» dans la maison des loas ou chez un particulier (oratoire ou rogatoire des loas), et de croire en leurs possibilités et en leurs pouvoirs pour qu’ils se manifestent. Voici en résumé ce que représente chaque Saint catholique pour chaque loa correspondant.
Saint-Patrick (Damballah): Vieillard pointant du doigt et donnant l’ordre aux serpents (de la main droite), et sceptre à la main gauche.
Saint-Ulrick (Agouet Aroyo ou Agoué): Vieillard tenant un poisson de la main droite, un livre et un sceptre de la main gauche.
Mater Dolorosa (Fréda): Femme couverte d’or et de bijoux.
Sainte-Philomène (Filomise): Une femme en prison, fleur à la main.
Saint-Lazare (Maître GrandChemin): Vieillard sur une route, accompagné de trois chiens.
Saint-Jacques Le Majeur (Ogou): Homme à cheval blanc, en pleine bataille.
Saint-Joseph (Loko Atissou): Homme portant un enfant de la main gauche, et une fleur à la main droite.
Sainte-Claire (Clermesine): Femme habillée en nonne, éclairant le monde d’une lanterne.
Saint-Antoine de Padoue (Legba, rite Pétro): Homme portant un enfant de la main droite.
Saint-Nicolas (père des Marassa): Vieillard entouré d’enfants.
Saint-Isidore (Azaka Médé): Paysan laboureur agenouillé et en train de prier.
Saint-Pierre (Legba): Homme, une clef à la main droite, et un livre à la main gauche, perché d’un coq rouge.
Saint-André (Simbi Andeizo, rite Pétro): Homme portant une croix – qui a aidé Jésus à porter sa croix.
Saint-Paul (Saint-Expedit): Jeune soldat présentant une croix (HODIE) de la main droite, et une feuille de rameau à la main gauche.
Sainte-Rose de Lima (Fréda): Femme baisant le pied de l’enfant Jésus.
Jésus-Christ (Lenglensou): Jésus (Olofi) crucifié, ensanglanté et couronné d’épines.
Notre Dame du Perpétuel Secours (Erzulie Dantor): Femme noire à balafre portant un enfant de la main gauche, tandis que l’autre main est placée sur sa poitrine.
Saint-Georges (Ogou Feraille ou Ogou Chango): Homme à cheval blanc et carpe rouge tuant le Dragon.
Saint-Jean Baptiste (Ogou Saint-Jean): Enfant accompagné d’un mouton, sceptre en bois de la main droite.
Santa Barbara (Erzulie aux yeux rouges): Jeune femme couronnée et carpe rouge, fixant une croix.
Saint-Martin de Porrès (Baron Samedi): Jeune homme tenant un balai de la main droite, et un crucifix à la main gauche.
Saint-Gérard Magella (Guédé Nibo): Homme habillé de noir, une croix à la main droite.
Saint-Côme et Saint-Damien (Marassa): Les deux jumeaux.
Fe, Esperanza et Caridad (Marassa): Les trois jumeaux.
Le choix d’une icône ou d’un chromo catholique adopté pour représenter un loa ou un Esprit vaudou ne jouit pas nécessairement d’une telle dévotion en raison des vertus chrétiennes du Saint ou de la Sainte. Cette option est plutôt due à des détails picturaux qui portent le «serviteur» à déceler des attributs propres à la divinité en question.